Dans la seconde moitié du XXe siècle, la mode ne se contente plus d’habiller : elle incarne les espoirs, les luttes et les contradictions d’un monde en pleine mutation. Des sixties audacieuses aux excès des années 80, chaque décennie marque une étape clé dans cette fascinante transformation. Préparez-vous à un voyage vibrant au cœur de ces années qui ont redéfini la manière dont nous nous habillons – et ce que cela raconte de nous.
Les années 1960
La génération Baby Boom devient adulte
Les Baby Boomers, devenus adultes, bouleversent la mode en imposant la jeunesse comme idéal absolu. Ils cherchent une mode accessible, bon marché et capable de refléter leurs rêves de liberté et de modernité. Avec une économie en plein essor, ces jeunes consommateurs transforment la mode en un véritable phénomène de masse, loin des cercles élitistes d’antan. Ces importants consommateurs imposent un nouveau rythme, où le style doit être à la fois tendance et abordable.
L’avènement du prêt-à-porter
La mode devient un moyen d’expression universel. Le prêt-à-porter révolutionne les vitrines, rendant les styles à la fois abordables et variés. Les jeunes adoptent les codes vestimentaires pour affirmer leurs opinions, et à la fin de la décennie, les tenues deviennent des moyens de manifester des idées et des revendications. La libération sexuelle, favorisée par la légalisation de la pilule, brise les tabous et inspire des créations audacieuses. Parallèlement, le milieu de la musique et du cinéma s’impose comme une force majeure, dictant les tendances et affirmant l’émergence d’une génération libre et résolument moderne.
Liberté, Paix et Amour
Modes de vie alternatifs
Les années 60 et 70 voient une politisation accrue de la vie publique. En pleine Guerre Froide, les crises internationales, Mai 68 et le terrorisme en Europe marquent les esprits. Face à ce climat tendu, des modes de vie alternatifs émergent : la consommation de drogues, les amours libres et un grand mouvement féministe redéfinissent les règles sociétales.
Le choc pétrolier de 1973 amplifie ces bouleversements en favorisant un retour au naturel. La mode devient un moyen d’expression démocratique, permettant à chacun d’affirmer son individualité.
Le fait main
Après 1973, les matières naturelles et les techniques artisanales reviennent sur le devant de la scène. Tricot et crochet s’imposent comme des symboles de cette recherche d’authenticité. Mais ce retour aux sources ne s’arrête pas à la simplicié : le "hippie de luxe" fait son apparition, porté par Yves Saint Laurent et ses robes bédouines ou vestes afghanes. On s’enthousiasme pour tout ce qui évoque le traditionnel, le rural, ou les cultures lointaines.
Les voyageurs, ou "pèlerins", de retour d’Inde rapportent dans leurs valises des caftans, pantalons drapés et gilets brodés, venant enrichir cette palette ethnique.
Le glam rock et le disco
Dans un climat souvent morose, le glam rock et le disco deviennent des antidotes vibrants. Ces styles offrent une évasion à travers des paillettes, des justaucorps moulants et des matières comme le lurex ou le spandex. Associés à la musique et à la danse, ces tenues éblouissent sous les projecteurs, incarnant une mode festive et exubérante. En opposition au retour au naturel, ils symbolisent un monde où l’énergie créative et la volonté de briller transcendent les difficultés.
Working Girl et Golden Boy
Sur-consommation et insouciance
Après l’authenticité des années 70, les années 80 opèrent un virage à 180 degrés. Influençées par le style disco et glam rock, elles sont synonymes de fric, frime, sur-consommation, mais aussi de fun, liberté outrancière, prospérité et insouciance.
La femme conquiert son émancipation professionnelle : elle devient une working girl qui (sur)affiche son pouvoir. Indispensable de son dressing, la veste blazer aux épaulettes démesurées (Thierry Mugler) incarne cette transformation, popularisée par des icônes comme Mélanie Griffith dans Working Girl, Angela Bower dans Madame est servie ou encore Michael Jackson dans Thriller.
La décennie des couturiers
Les années 80s voient l’émergence d’empires bâtis par des couturiers tels qu’Armani, Calvin Klein ou Ralph Lauren. La haute couture et le prêt-à-porter de luxe connaissent un succès fulgurant aux États-Unis, portés par un dollar très fort. Les riches exhibent leurs richesses lors des bals organisés par le président Reagan, tandis que des séries comme Dynastie et Dallas mettent en scène cette vie ostentatoire.
La lingerie s’émancipe et devient un vêtement à part entière. Le soutien-gorge et le corset, revisés par des créateurs comme Vivienne Westwood, Jean Paul Gaultier et Olivier Theyskens, s’affichent pour la première fois. Symbole de libération, d’érotisme et d’affirmation de soi, ces pièces deviennent un message fort de la décennie.
Fin de siècle : montrer son corps
Un air vintage
La chute du mur de Berlin en 1989 et la réunification des deux Allemagnes marquent la fin d’une époque. Avec la mondialisation politique, culturelle et technologique, les frontières entre réel et virtuel deviennent floues, sous l’influence des médias omniprésents.
Un souffle vintage traverse la mode. Les sixties revivent à travers des créations juvéniles, tandis que Galliano pour Dior réinterprète les années 20. Les années 70 restent également d’actualité. Les codes vestimentaires s’assouplissent, permettant au caleçon ou au jean de s’imposer même au travail. La mode sportive devient un phénomène quotidien, et il n’est pas rare de voir des associations inédites, comme des chaussures de sport portées avec des lunettes de luxe !
Vers un minimalisme
À l’opposé des extravagances des décennies précédentes, un style épuré s’impose. Les coupes sont structurées et monochromes, les couleurs neutres dominent, et la simplicité se mêle à la sophistication. Les vêtements misent sur des tissus de qualité et des détails discrets. Les accessoires, comme les montres, sacs et chaussures, privilégient la fonctionnalité tout en restant raffinés. Enfin, la beauté naturelle prime avec des cheveux lisses et un maquillage léger, reflétant une quête de sobriété et d’intemporalité en écho à une époque où l’excès fait place à la réflexion.
À travers ses décennies vibrantes, la mode s’est imposée comme bien plus qu’un simple art de s’habiller. Des revendications politiques des sixties à l’insouciance tapageuse des années 80, elle a capté les espoirs, les tensions et les rêves d’un monde en perpétuel changement. Chaque silhouette, chaque matière, chaque audace vestimentaire raconte l’histoire d’une époque, oscillant entre individualité et mouvements collectifs.
Alors que l’exubérance cède parfois à la sobriété, que l’artisanat dialogue avec l’industrie, la mode reste un langage universel, où se mêlent nostalgie et innovation. Elle est un terrain de jeu infini, un reflet fidèle de nos luttes comme de nos célébrations.
La première partie est disponible ici.